dimanche 5 juin 2011

Pourquoi j’aime Franz Kafka

Extraits de “Lettre au père », jamais remise à son destinataire :

« (...) ce sentiment de nullité qui s’empare si souvent de moi (sentiment qui peut être aussi noble et fécond sous d’autres rapports, il est vrai) tient pour beaucoup à ton influence. Il m’aurait fallu un peu d’encouragement, un peu de gentillesse, j’aurais eu besoin qu’on dégageât un peu mon chemin, au lieu de quoi tu me le bouches, dans l’intention louable, certes, de m’en faire prendre un autre. »

« J’étais déjà écrasé par la simple existence de ton corps. Il me souvient, par exemple, que nous nous déshabillions souvent ensemble dans une cabine. Moi, maigre, chétif, étroit ; toi, fort, grand, large. Déjà dans la cabine je me trouvais lamentable, et non seulement en face de toi, mais en face du monde entier, car tu étais pour moi la mesure de toutes choses. »

« En tout cas, nous étions si différents et si dangereux l’un pour l’autre du fait de cette différence que, si l’on avait voulu prévoir comment nous allions, moi, l’enfant se développant lentement, et toi, l’homme fait, nous comporter l’un envers l’autre, on aurait pu supposer que tu allais me réduire en poussière et qu’il ne resterait rien de moi. Or cela ne s’est pas produit, les choses vivantes ne se calculent pas à l’avance ; mais il s’et produit quelque chose de plus grave peut être. En disant cela, je te prie instamment de ne pas oublier que je ne crois pas le moins du monde à une faute de ta part. Tu as agi sur moi comme il te fallait agir, mais il faut que tu cesses de voir une méchanceté particulière de ma part dans le fait que j’ai succombé à cette action. »

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