Il arrive souriant, les yeux qui pétillent, prêt à me laisser entrer dans son intimité. J’ai une ou deux questions à lui poser, le reste est l’œuvre de son ouverture, de son désir de partage. Je suis plutôt habituée à donner des interviews, donc me voici prisonnière d’une émotion, d’une maladresse inconnue. J’avais des appréhensions quant au résultat, quant à la forme. Je ne voulais surtout pas le décevoir. Nommez- moi « ringarde », j’ai adoré cette découverte d’un homme riche, simple, dans le vrai.
Tous les jours à l’ISEG, c’est lui qui ouvre, c’est lui qui ferme. Il y a beaucoup qui le traitent de « pilier » de l’institut. Arrivé en France le 16 février 1991, Omar ne fait partie du Groupe Ionis que depuis 2003. Il était le couteau suisse des anciens locaux (Rue du Général de Castelnau), il l’est toujours dans l’ancien hôtel Livio, Rue du Dôme. Vous voyez, le temps passe, des Iségiens reçoivent leurs diplômes à Paris, Omar ne bouge pas. Parce qu’il ne le veut pas : « On reste jeune quand on est parmi des étudiants. Je veux de cette jeunesse, Bianca. Toujours, toujours ! »
Ce qu’il aime le plus, c’est de parler avec tout le monde. De la 1ère à la 5ème année, il échange des idées (me fait-il savoir) sur les études en priorité, sur la crise économique, sur la culture générale et sur le football. Nous concluons qu’Omar lit les actus, qu’il aurait beaucoup de choses à nous apprendre, tout en étant un fervent supporter du Racing, de l’OM et, bien sûr, des Bleus. J’ai eu des échos, comme quoi il jouait très bien aussi. Je vous défie donc d’être ses adversaires tous les week-ends, au stade de l’ASPTT de Koenigshoffen.
Notre gardien du temple parle ouvertement sur ses deux cultures, berbère et arabe. Il se méfie des amalgames et m’explique qu’il est berbère avant d’être arabe : « A la maison, nous parlons le berbère, J’ai appris le français au Maroc. » J’ai évité d’être trop envahissante sur cet aspect, je l’ai laissé dire ce qu’il voulait que nous sachions. Voici la définition d’une belle personne pour lui : « Quelqu’un qui a le sens de la justice, du partage et qui respecte la parole donnée. C’est très important, hein ! (les yeux grand ouverts) » Très beau surtout, j’acquiesce. Il est pédagogue et me donne tout de suite un exemple concret : « Vous voyez, Bianca, si je dis à ma femme que je lui achèterais un cadeau si j’avais la prime de Noel, il faut absolument que je le fasse ! ».
Omar s’avère aussi un fin analyste des comportements. Les sourcils froncés, il me laisse savoir qu’ « il y a beaucoup de gaspillage-papier en salle info et que les gens n’éteignent pas toujours la lumière quand ils partent. » Il nous apprend aussi que les filles fument plus que les garçons, « 1 garçon pour 3 filles, donc 2 garçons – 6 filles. » Il est matheux. Mais les Iségiennes travaillent plus que les Iségiens, faut dire. « Les filles ont le stress. J’ai vu des garçons qui allaient faire les soldes aux Halles pendant que les filles de leur équipe bossaient. »
Me dit, en souriant, que certains gens de l’institut le respectent, d’autres l’aiment. « Je fais partie de quelle, catégorie, Omar ?»/ « Vous, Bianca, vous m’aimez. » J’acquiesce de nouveau. Pour finir, je le prie de me sortir des métaphores de la culture arabe que j’admire tant. Je vous laisse, chers lecteurs, sur ces mots de sagesse : « L’amour de la femme nous rend aveugles. L’amour du pouvoir nous rend cruels. L’amour de l’argent nous rend corrompus. Mais l’amour de la science nous rend des hommes sages. » Et n’oubliez pas, « On ne construit pas une maison sur des sables mouvants. »
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